avant
20.11.2015C’était avant. Avant de partir sur la Côte Ouest. Avant de marcher une journée entière pour aller pleurer face au pont et revenir par les plages. Avant de rouler de long en large sur les boulevards de cette ville dont je suis tombé fou amoureux. Avant le soleil. Avant l’été retrouvé, avant les cafés trop allongés et les burritos au petit déjeuner. Les colibris, les écureuils, les routes en lacets parmi les maisons de luxe. Avant les jours de solitude et le silence.
C’était avant le Colorado, sa lumière crue, la neige. Denver et sa population de voitures et de parkings. Avant le grand raout avec les collègues du monde entier que l’on prend dans ses bras comme de vieux amis.
C’était avant le fil d’actualités qui ne tourne pas rond, la nausée au fond de la salle de conférences. Avant les tirs, les bombes, témoin les larmes aux yeux, seul à savoir durant de longues minutes, tremblant. C’était avant la distance de l’horreur, avant l’attente fébrile des traces des proches qui auraient pu mourir. Avant de plonger la tête dans l’ampli d’Alan Sparhawk pour apaiser les douleurs deux heures durant, c’est déjà bien deux heures. Avant le retour sur Paris, les larmes lorsque l’avion s’arrête, le mal de crâne de janvier qui reprend d’un seul coup.
Ils étaient debout tous les quatre. Georgia dansait doucement au rythme de son maillet et de ses balais. Je ne sais plus comment la chanson a commencé. Je crois que c’est à « We were gonna talk all night till I went away » que j’ai décollé. Le monde s’est évanoui. Il n’y avait que sa voix, les boucles des guitares et de la contrebasse qui ne s’arrêtaient pas. Ça n’est qu’une fois Pass the Hatchet bien entamée que j’ai progressivement repris conscience. J’ai attrapé la main de ma fille, croisé le regard de mon frère de l’autre côté, celui d’Emmanuel. Tout le monde souriait.
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